« Le danger, c’est le blogs » nous dit François Mitterrand… danger oui certainement, pour l’ordre politique établi qui voit (seulement maintenant) arriver une nouvelle forme de compétition politique, émanant non pas du parti opposé, mais cette fois-ci directement de l’électeur.
L’ère des médias sociaux donne au web une nouvelle dimension en en faisant un espace public… un espace de parole. Or la parole, qu’elle émane de blogs ou d’autres médias n’est pas que simple bavardage. Nos hommes politiques contemporains l’ont bien compris en occupant à loisirs l’espace médiatique… : la parole est pouvoir. Pour reprendre les écrits de Pierre Clastres, anthropologue politique français du milieu du XXème siècle dans son ouvrage « La société contre l’Etat« , la parole est l’émanance même du pouvoir dans nos société. En étudiant les sociétés indiennes d’Amérique du sud Pierre Clastres souligne un trait fondamental de l’infrastructure de nos sociétés actuelles (pas très marxiste ce que je dis là on est d’accord…) : dans ces sociétés, le chef est l’homme qui parle. En somme, le pouvoir, le sens politique, provient de celui qui parle. Or avec Internet, force est de constater que la parole n’est plus l’apanage du chef, c’est à dire du politique. Le blog : journal intime, récit de vie, tribune libre, média d’un autre genre est avant tout un outil de parole, donc un outil politique.
Alors forcément, lorsque Frédéric Mitterrand, ministre de la culture parle des blogs comme un danger, on se dit que oui, les politiques commencent à comprendre…. à comprendre se qui joue sur la toile. Internet n’est plus ce réseau de « nerds ». La France compte, rappelons le, plus de 34 millions d’internautes. Et ces mêmes français lisent les blogs, blogs qui font aujourd’hui l’opinion peut-être autant, si ce n’est plus, que le 20h.
Le web social est une société parallèle avec ses acteurs et ses jeux de pouvoir. Tant que ce pouvoir restait restait contenu derrière l’écran, le politique assis sur le banc de l’assemblée nationale pouvait encore s’en désintéresser. Mais les usages et consommations médiatiques glissent et muent. « Le petit écran n’est plus un repère ». Le bouche à oreille voit sa puissance décupler sur le net, et la conversation de bistrot devient une menace d’une toute autre ampleur dès qu’elle a lieu online.
Citizen Kane a laissé la place à citizen Web. Les règles n’ont pas changé… le terrain oui. Or sur ce terrain là, la génération Y est chez elle, alors que nos hommes politiques le découvrent à peine, et tentent de l’investir non sans peine, à tâtons et avec grande maladresse. La peur des blogs, somme toute, est une question de génération… l’une perdant le pouvoir au profit d’une nouvelle.